Câlins et Agressivité

[:fr]Câlins et Agressivité: Pourquoi un chien grogne, montre les dents ou mord lorsque quelqu’un le caresse ou le câline? Comment comprendre cette agressivité? Comment réagir? Comment réaparer la situation en toute sécurité?

Question de Lise V: Notre chien, un Labrador de 3 ans, vient de « snapper » au visage ma fille de 16 ans. Pourtant, elle ne faisait que le câliner sur le sofa ! Je pourrais comprendre avec un petit enfant qui lui ferait mal en lui tirant les oreilles ou quelque chose comme ça mais ma fille adolescente qui est douce avec lui, je ne comprends pas !? On nous a dit que c’est parce que le chien perçoit que notre fille n’est pas un chef de meute, étant plus jeune que les adultes. En effet, il n’a pas réagi de cette manière avec moi ou mon conjoint – juste notre fille. Après qu’il a « snappé » notre fille mon conjoint l’a câliné également et il a grogné. Mon conjoint l’a disputé et il a arrêté tout de suite. Comment apprendre à notre fille de devenir plus autoritaire avec le chien ? Elle n’a pas une personnalité très forte...

R: Je décide de publier votre question avec ma réponse car c’est une situation beaucoup trop courante et source de beaucoup de mésententes et peine pour plusieurs propriétaires.
Pour débuter, sachez qu’avec de la bonne information vous serez outillés de renverser la situation et rendre votre chien beaucoup plus sécuritaire et heureux. Votre fille n’aura pas du tout besoin de devenir plus autoritaire, bien au contraire, elle pourra demeurer douce tout au long de la réhabilitation de votre Labrador. En fait, tout le monde devra user de douceur et empathie afin de réellement régler le problème.
Regardons d’abord pourquoi votre chien a « snappé » un humain qu’il connaît et qui est gentille avec lui ? Vous me dites que c’est arrivé pendant que votre fille le câlinait. Tous les primates (les humains inclus !) aiment donner des câlins, serrer dans les bras et toucher ceux qu’ils aiment : cela leur procure du bonheur et plaisir à eux et à celui qui reçoit ces gestes d’affection en autant que c’est un autre primate et qu’il est consentant.

Un gros problème est que nos chiens, bien qu’incroyablement adaptés et extraordinairement tolérants, ne sont pas des primates. Pour les canins, se faire donner un câlin est très effrayant, désagréable et stressant. Se faire serrer dans les bras et recevoir une pluie de bizous peut aisément égaler à un moment d’horreur pour notre ami canin ! Il n’est pas étonnant que plusieurs morsures arrivent durant ces moments de « tendresse », d’après la perception de l’humain impliqué. Si le chien pouvait parler, il parlerait plutôt en terme d’attaque, abus et un de ses pires cauchemars. Il y a énormément de chiens qui subissent et tolèrent ces gestes d’affection de notre part sans jamais protester. Par contre, en apprenant à lire le langage non verbal canin, vous aurez beaucoup de difficulté de trouver des photographies de chiens qui se font câliner où le chien semble confortable. On devrait remercier l’extrême tolérance de ces chiens mais ne pas blâmer ceux qui réagissent plus naturellement à ce stress. Les chiens de famille peuvent apprendre à bien tolérer ces marques d’affection humaine et, une fois qu’ils auront appris à ne pas les craindre, peuvent même commencer à les apprécier. Il y a des exercices que j’aime apprendre à tout chien de compagnie qui consistent à justement lui expliquer que ces comportements humains ne sont pas à craindre et les associer positivement. On peut donc rendre la vie de ces chiens qui se font câliner plus confortables pour eux et plus sécuritaires pour l’entourage également. Je décrirai ces exercices plus bas.

Ensuite, il y a la question du consentement : par exemple, on ne s’attend plus, heureusement, dans notre société, qu’une femme tolère passivement que quelqu’un la touche « affectueusement » ou « gentiment » si elle n’est pas consentante : cela équivaut rapidement à de l’harcèlement. Une personne peut ne pas être à l’aise de se faire toucher à cause de l’identité de la personne qui veut la toucher, de l’endroit ou manière de se faire toucher, ou du moment choisi par la personne qui veut la toucher. Pour nos chiens, qui sont une espèce différente mais tout de même partagent beaucoup avec l’être humain, c’est un peu la même chose : le chien peut être à l’aise de se faire toucher par sa famille mais pas par les étrangers, être à l’aise de se faire gratter derrière les oreilles mais avoir peur de se faire serrer dans les bras ou toucher la patte douloureuse, peut apprécier un massage pendant qu’on regarde un film le soir mais se sentir mal à l’aise lorsqu’on le touche pendant qu’il mange. On demande rarement à nos chiens leur consentement pour quoique ce soit : ils sont, par la domestication, des prisonniers qui subissent à quelle heure ils vont manger, sortir, jouer etc. Ensuite, tout dépend sur quel propriétaire le toutou à tombé : il y a les chanceux qui se font beaucoup aimer et bien prendre soin de, d’autres ont des humains pleins de bonnes intentions mais peu informés ce qui cause des problèmes et il y a ceux, les moins chanceux, qui sont tombés sur des humains qui considèrent le chien comme le dernier des esclaves ou un robot, qui n’a aucun droit d’exprimer ses états d’âme ou préférences et doit juste subir tout ce qu’on veut lui faire subir. Je ne vous connais pas mais j’ai tendance à présumer que vous appartenez à ceux qui aiment réellement leur chien et veulent que la cohabitation soit harmonieuse pour les deux côtés !
Il y a heureusement très peu de gens qui aiment avoir des esclaves canins éteints avec un système nerveux complètement détruit. Il est possible de rendre une personne ou un animal dans un état de grave dépression en lui faisant perdre tout espoir de se sortir de situations d’abus. Cela s’appelle « casser un chien » ou  « impuissance acquise / résignation acquise », une réalité que vivent certains prisonniers par exemple et malheureusement encore trop de chiens au nom de « l’entraînement ». La majorité de propriétaires de chiens veulent un compagnon joyeux et non un être éteint et « cassé », rampant à leurs pieds sans aucune joie de vivre, qui n’ose bouger sans commande. Certains sadiques ou personnes qui bénéficieraient d’une bonne thérapie, essaient de convaincre les gens que rendre son chien totalement éteint est la seule manière de le rendre sécuritaire. Heureusement, c’est complètement faux et il n’y a aucun abus nécessaire lors de l’éducation d’un bon chien de famille. La différence majeure entre un chien sécuritaire et dangereux sont ses propriétaires, comment ils traitent le chien et quelles informations et outils ont-ils à leur disposition. Plus un propriétaire est informé et outillé, moins il y a de danger que son chien cause des accidents.

Le chien a des façons limitées de tenter de s’exprimer. Il ne peut, malheureusement, dire à votre fille « écoute, j’aime beaucoup le contact avec toi mais je ne me sens vraiment pas à l’aise lorsque je me sens coincé, j’aimerais que tu le prennes en considération svp ». Lorsqu’il a peur, stresse et n’est pas à l’aise dans une situation, il va s’exprimer en parlant « chien » : avec son corps. Un jour, j’espère qu’un petit livret du « Chien 101 » sera obligatoire avec tout achat ou adoption de chien : ceci permettra aux gens de mieux comprendre leur compagnons poilus et éviter un tas de conflits et incidents. Il est difficile de trouver une morsure qui, pour un professionnel en comportement canin compétant, n’était pas prévisible et possible à prévoir : c’est simplement parce qu’un bon professionnel a apprit ce langage corporel. Toute personne peut aujourd’hui l’apprendre et je recommande de l’étudier minimalement à toute personne qui entre en contact avec un chien! (Voir liens plus bas)
Il y a des signaux que le chien commencera à envoyer dès qu’il se sent mal à l’aise : il peut se lécher le nez, chercher à détourner la tête, le regard, fermer la bouche et arrêter de cligner des yeux….ce sont tous des signes qui veulent dire que le chien n’est pas bien et qu’il aimerait bien que la situation change. Évidemment, l’animal ne peut comprendre que les humains qui n’ont pas reçu cette information ne comprennent simplement pas : ils doivent croire qu’on voit ce qu’il dit mais qu’on continue simplement. Étant donné que la situation ne change pas et le chien continue de se sentir mal, il va augmenter les signaux, toujours pas compris. Lorsqu’il n’en pourra plus car son niveau d’angoisse augmente il va changer pour des signaux plus gros, plus extrêmes comme figer, grogner, montrer les dents, et « snapper »= mordre dans l’air ou pincer sans arracher un morceau de chair (le plus petit des caniches à une dentition capable de tuer un lièvre et déchirer de la chair ! Lorsqu’un chien fait contact avec ses dents sans envoyer la victime à l’hôpital, on peut être assurés qu’il s’est énormément retenu dans son geste !). Normalement, c’est seulement à ce moment que l’humain remarque que le chien s’exprime. Comble de malheur canin, il est maintenant bien à la mode d’interpréter un chien qui grogne, montre les dents ou « snappe » comme un chien défiant l’autorité, dangereux, dominant etc. Pourtant, « qui est le boss » est probablement le dernier des soucis du chien dans ces moments : il a simplement peur, mal, ou peur d’avoir mal.

L’humain a également peur de ces manifestations de ce qui lui semble être de l’agressivité : comme tout autre animal, nous sommes programmés à ressentir de la peur et un mode de forte alerte lorsqu’on aperçoit des dents trop près de nous ou lorsqu’on entend un grognement. L’humain surprit par un grognement ou du « snappage » risque fort bien donc de chicaner et punir le chien pour ces expressions de peur pendant que son adrénaline monte. Le chien peut alors soit s’écraser de peur et ne plus oser bouger, soit, lorsqu’il a vraiment trop peur penser que ça y est, sa vie est en danger, l’humain qu’il croyait son ami l’attaque. On peut ainsi terminer avec un chien qui mord réellement ou un chien qui a peur de nous, nous du chien,  bref, la confiance et l’amitié se voient fracassées. Simplement, on ne parle pas la même langue et on se comprend mal. Étant donné le gros cerveau de l’humain, je crois qu’il serait plus facile pour nous de comprendre le langage du chien plutôt que de lui demander l’inverse :
Il faut comprendre ce qui se passe du côté du chien : lorsqu’il commence à envoyer des signes plus subtiles comme détourner sa tête, se lécher le nez, fermer sa bouche et tenir ses yeux grands ouverts, il n’a aucune idée qu’on ne comprend pas. Il est entrain de nous dire, très doucement et poliment de svp arrêter ce qu’on lui fait car il a peur ou mal. Disons que j’aime bien serrer mon chien dans mes bras et lui donner des bizous pendant qu’on est assis sur le sofa ensemble. Je ne suis pas au courant que le chien normal trouve cela effrayant et désagréable, simplement car il est une autre espèce. Je le câline donc tout en n’ayant aucune idée que mon chien a peur. Lui, de son côté, aime bien ma présence mais devient très mal à l’aise lorsque je le tiens coincé avec mon bras. Il arrête de bouger en essayant de me communiquer qu’il aimerait que je le lâche. Je ne comprends visiblement pas car je continue. Il se détourne la tête et se lèche les babines, un signal certain qu’il est très très mal à l’aise. De mon côté, je ne remarque rien et va chercher sa tête qui me semble bien loin pour lui donner un bizou sur la joue parce que je l’aime mon toutou…ceci triple son stress car les chiens sont très conscients de où ils mettent leur dents ! Vous avez certainement remarqué que la majorité des rencontres entre chiens commencent par le reniflage du derrière de l’autre : de un, il y a de l’information exprimée par odeurs à cet endroit mais surtout, c’est le bout du chien « non armé » ! Lorsqu’un chien rapproche son museau d’un autre, il accompagne ce geste qui pourrait facilement être interprété comme une menace, avec des signaux pacifiques telles les yeux très petits qui clignent beaucoup, les lèvres étirées au maximum vers l’arrière (lorsqu’on va mordre, on étire les lèvres par l’avant!) et d’autres. Lorsque nous, primates, voulons être affectueux et embrasser notre bien aimé(e), on approche notre visage du sien, on mets les babines vers l’avant pour le bizou et on n’y pense pas que, dans un langage canin, cela est une menace sérieuse et qu’il n’y a aucune politesse dans ce geste, bien au contraire. Mon pauvre chien donc, qui essaye depuis un moment d’exprimer qu’il n’est vraiment pas à l’aise d’être coincé dans mon câlin, se voit maintenant exploser de peur en voyant mon geste si menaçant naturellement pour lui : j’approche mes dents de son visage ! S’il n’était pas aussi coincé dans mon câlin il se serait éloigné depuis un bon moment, mais accoté contre le dos du sofa avec moi qui l’envahit il se peut qu’il panique. Il pourrait alors grogner, montrer les dents, « snapper » dans l’air pour désespéramment tenter de se sauver de cette situation extrêmement angoissante. L’équivalent de moi qui hurlerait « arrête enlève ton couteau de ma gorge au secours 911 »….je me trouverais extrêmement patiente avec mon agresseur si telle serait ma réaction à ce stade: même selon notre code de justice, je serais totalement en droit d’assommer, frapper, mordre et donner des coups de pieds à celui qui tient un couteau à mon visage. Pourtant, lorsque le chien fait encore preuve d’énorme tolérance et ne fait que « snapper » sans nous rendre à l’hôpital, on l’étiquette « agressif ». Personnellement, je tiens à remercier chaque chien qui grogne après moi : il me donne une dernière chance (parce que clairement je n’ai rien compris de ses communications précédentes) et évite de me mordre dans une situation où je l’aurai probablement déjà fait à sa place.
Sauf que moi, de mon côté, je n’ai rien vu venir et je n’y comprends rien: mon chien si gentil d’habitude, tout à coup, devient agressif ! J’ignore que cela fait un long moment que mon chien souffre, stresse et essaye de me demander du mieux qu’il peut de lui donner un peu d’air. J’ignore également que lorsqu’un chien montre les dents, grogne ou « snappe », son but est de justement éviter la vraie agressivité. Il aurait pu me mordre directement mais non, malgré toute son angoisse, il essaye tout de même d’éviter le conflit. Moi qui n’y comprend rien car selon ma perception je ne lui faisais rien de mal. Je sursaute à son grognement, j’ai peur, je ne comprends pas, je le chicane ou même punis car je ne veux pas que mon chien « soit agressif ». De son côté, le chien est au fond du désespoir : son humain, si gentil d’habitude – ignore totalement ses appels à cesser le conflit, lui fait peur, et maintenant l’attaque malgré qu’il avait tout essayé ce qu’un chien peut essayer pour éviter un conflit.
Il suffit que j’arrête et m’informe pour enfin comprendre ce qui se passe pour mon cabot. Armé de mes nouvelles connaissances, je vais pouvoir arrêter d’avoir peur de mon chien, comprendre que son « agressivité » était en fait des tentatives d’éviter une morsure et que la peur, stress ou douleur sont responsables de la réaction du chien sur la défensive. Je peux apprendre à lire mon chien afin qu’il n’ait plus besoin d’aller jusqu’à « snapper » ou montrer les dents pour me communiquer qu’il a peur. Dorénavant, je vais devenir son ami, son protecteur et son garde du corps : je peux rebâtir sa confiance en moi et lui indiquer que s’il a peur, il n’a pas besoin de se défendre : je vais « le sauver » : je vais arrêter l’enfant qui essaye de le câliner au moment où je vois qu’il commence à se lécher le nez. Il n’aura plus besoin d’aller plus loin pour se faire comprendre ce qui évitera les grognements et « snappage ».
Lorsque je le manipule pour le toiletter ou le flatter, je serai dorénavant attentive à ce qu’il dit et je vais rajuster mes actions afin de le sécuriser. Je vais pouvoir de cette manière regagner sa confiance et même remarquer s’il a un début d’arthrite ou blessure grâce à ses réactions  subtiles au toucher.

Ce n’est pas tout. Mon chien va apprendre puis pratiquer, pratiquer et repratiquer que « parler » aux humains avec des petits gestes fonctionne. Il va être confiant que si un humain le rend inconfortable il n’a qu’à détourner la tête en se léchant le nez afin que je comprenne et arrête la situation. Ceci est un point qui rend un chien beaucoup plus sécuritaire! Le chiot élevé de cette manière possède la croyance que simplement demander un arrêt fonctionne. Donc, le jour où je ne regarde pas deux minutes et qu’un enfant le coince dans un coin et câline ou même tire la queue, il va détourner la tête, lécher son nez, détourner la tête plus, arrêter de cligner les yeux, répéter et répéter ces étapes qui…d’habitude fonctionnent! Un chien qui a apprit que malheureusement, les humains ne réagissent jamais aux communications subtiles et que pour se faire écouter il faut toucher la peau avec ses dents ou du moins grogner, risque de rapidement sauter des étapes et grogner ou « snapper » rapidement sans perdre le temps sur de la communication inutile que personne n’écoute. C’est là qu’on peut comprendre pourquoi les éducateurs canins professionnels s’arrachent les cheveux lorsqu’ils entendent des recommandations du type « il ne faut pas le laisser gagner lorsqu’il grogne ! »…. Évidement, on ne veut pas d’un chien qui grogne au départ. Sauf que, si un chien est rendu au stade de grogner et qu’on s’assure que grogner ne sert à rien (ne va pas faire reculer l’enfant qui fait peur ou mal au chien à ce moment), qu’apprend-t-on au chien au juste ? Que grogner ne fonctionne plus pour éloigner ce qui t’incommode. Il y a des chances que le chien prenne des notes et comprend qu’il doit se rendre jusqu’à la morsure pour que ça fonctionne!
Pourquoi ne voudrait t-on pas qu’un grognement fonctionne au départ ? La nature a bien fait les choses : normalement, la personne qui flatte un chien et que le chien grogne, retire sa main et s’éloigne. Super ! Aucune morsure ! Si grogner ne fonctionne plus pour éloigner ce que l’on craint, il ne reste qu’augmenter les signes de menace et éventuellement passer à l’action.
Les gens qui ont peur de laisser le chien « gagner » ne sont souvent pas au courant qu’un chien grogne pour justement éviter une morsure et qu’il le fait car il est sur la défensive car il a peur ou mal. Il y a des mythes qui circulent comme quoi reculer lorsqu’un chien grogne équivaut à « le laisser gagner » et que ça y est, ce chien va maintenant conquérir l’univers. C’est assez absurde. Surtout que le chien, lui, ne voulait pas se battre. Il n’est pas nécessaire de le faire « perdre » pour qu’on « gagne ». Dans une relation avec son chien, on peut perdre tous les deux (on se fait mordre et le chien se fait tuer car « agressif ») ou bien gagner tous les deux (le chien réussit à éviter ce qu’il craignait et nous on ne saigne pas). Pourquoi donc encourager un propriétaire de se battre avec son chien ??? Puis en plus argumenter que se battre avec son chien et le faire perdre est le meilleur moyen de le rendre sécuritaire ? Le chien, lui, espèce sociale, conçu pour collaborer, répond très bien à une éducation où, au contraire, on commence par lui indiquer qu’il n’y a pas de raisons de se battre avec un humain. Un chien confiant, qui aime ses humains et se sent en sécurité avec eux, qui n’a pas développé de nervosité et n’a pas eu besoin de se mettre sur la défensive face à des humains, lui, il est sécuritaire.
Lorsqu’un chien grogne, montre les dents ou « snappe », j’aimerais que ça fonctionne tout de suite : on éloigne la personne ou l’animal après qui le chien grogne, on arrête de faire ce qu’on faisait, on sort de la pièce : oui, je veux que le chien apprenne que mal pris, grogner va faire cesser ce qu’il n’aimait pas et qu’il n’a surtout pas besoin d’aller plus loin. Oui, oui, il « gagne ! ».  Idéalement, on enseigne aux propriétaires comment reconnaître que leur chien commence à se sentir inquiet bien avant qu’il ne se rendre à grogner ou montrer les dents. par contre, si on a raté les signes précurseurs et el chien grogne, sur le coup on arrête tout: on s’en va ou on distrait le chien en prenant sa laisse pour lui proposer une promenade, on va l’appeler en ouvrant le frigo pour manger : on évite le conflit en changeant de sujet. On prend des notes pour essayer de comprendre qu’est-ce qui a fait réagir notre chien ? On pourra, surtout avec l’aide d’un professionnel qualifié, travailler sur des exercices qui vont aider notre chien a changer sa perception de la situation et donc ne plus avoir besoin de grogner. En attendant, on évite le trouble. Si, par exemple, le chien avait peur et a grogné après un étranger qui voulait le flatter, on pourra graduellement faire du contre conditionnement et associer les approches, puis les touchers de la part des étrangers à du foie séché ou autre truc préféré de notre chien. Le résultat d’un bon contre conditionnement est un chien qui, à la place d’être nerveux et se sentir sur la défensive prêt à grogner lorsqu’un étranger l’approche, voit l’étranger approcher et en est heureux, se sent en sécurité et espère une récompense. Il ne pensera ni à grogner ni à mordre.

Évidemment, il y a un tas de choses qu’on doit apprendre à nos chiens de tolérer qui n’est pas naturel pour eux. On peut y arriver en créant des associations positives et sécurisant le chien:. la majorité des chiens n’aiment pas se faire flatter par des étrangers, angoissent lors de la coupe de griffes, sont inconfortables avec une grande partie de nos signes d’affection tels les câlins qui nous apportent à nous tant de bonheur. On peut, grâce à l’observation du langage canin, se faire une liste de situations que notre chien ne semble pas apprécier puis la classifier selon ce qu’il devrait apprendre à tolérer mieux le plus rapidement possible. Si le Beagle de mon cousin n’aime pas se faire tirer par les oreilles c’est normal et il est simplement nécessaire de s’assurer de le protéger des enfants qui pourraient le faire (tout en leur apprenant le respect). On pourra éventuellement lui apprendre à en tolérer plus que ce qui est confortable au cas où, mais en autant qu’il supporte bien les gratouilles douces de ces enfants on peut commencer par autre chose. Par contre, il devra apprendre à faire autre chose que d’aller se cacher en dessous de la table et grogner à la vue du coupe-griffe assez rapidement.

Même chose pour les câlins : maintenant qu’on comprend pourquoi un chien réagit mal à ceux-ci, on peut commencer par juste arrêter de le câliner. Étant donné qu’il serait pratique qu’il apprenne à les tolérer car les humains adorent en donner, on va devoir changer sa perception de la situation. On peut associer quelque chose qu’il adore avec des câlins. Pour la majorité de chiens, des bouts de viande, fromage ou autres merveilles de ce type fonctionnent bien :
On veut que le toutou comprenne que les morceaux de poulet, hotdog, foie séché ou fromage qu’il va recevoir sont directement associés à votre toucher. Tout dépendamment de comment votre chien a peur, on veut débuter très facile : pour certains chiens, on peut venir les toucher sur l’épaule et donner un morceau du délice. Toucher sur l’épaule en donnant une gâterie. Répétez jusqu’à ce que vous voyiez le visage de votre chien se détendre et le mot « biscuit » apparaître en gros néons sur son front ! Vous voulez que votre chien se rend compte que lorsque vous le touchez, cela veut dire qu’une merveilleuse gâterie arrive immédiatement ! C’est du conditionnement classique, le même qui arrive lorsque vous prenez sa laisse et qu’il devient tout content en anticipant une promenade qu’il adore : prendre une laisse ne veut rien dire au départ, c’est seulement avec des répétitions de prédire la promenade que ce geste prend une connotation aussi positive pour votre toutou. Vous voulez bâtir votre toucher à être aussi positivement associé. Pour certains chiens, surtout si le conflit est allé jusqu’à grogner ou snapper, il se peut qu’il devienne tendu dorénavant  lorsqu’il est sur le sofa et quelqu’un l’approche: il craint qu’un conflit pourrait arriver et n’a jamais comprit que selon vous, il en est le responsable. Dans ce cas, à la place d’aller toucher son épaule – ce qui serait aller beaucoup trop loin pour débuter- on peut simplement attendre qu’il soit sur le sofa puis entrer dans la pièce et lui lancer un morceau de nourriture, puis ressortir. Répétez quelques fois en s’assurant  que le chien a mangé les morceaux pendant que vous étiez ressortis. Après quelques répétitions, le toutou devrait modifier son expression et avoir l’air d’un chien qui dit « chouette, tu reviens me donner du poulet ? » et n’a plus de traces d’inquiétude de « oh nooon, la dernière fois que j’étais sur le sofa et elle a approché ça a mal terminé… ». Vous pouvez alors, graduellement, approcher de plus en plus en donnant des gâteries à chaque fois.
Peu à peu (le nombre de répétitions nécessaires à chaque étape varient énormément d’un chien à l’autre !), vous pourrez approcher votre chien sur le sofa pour lui donner du fromage et il va avoir hâte que vous le fassiez. Vous pourrez ensuite le toucher doucement puis le payer afin d’associer votre toucher au poulet. Peu à peu, selon le rythme que votre chien apprend à relaxer, vous pourrez le toucher plus fort, à différents endroits de son corps, avec tout le bras, en mettant plus de pression, en devenant plus invasif. Ce travail demande un peu de patience mais est extrêmement efficace à « réparer » des chiens « agressifs ». N’hésitez pas à vous faire accompagner par un professionnel compétant qui pourra vous coacher afin que tout progresse bien.
Éventuellement, vous voulez que lorsque vous donnez un câlin à votre chien, celui-ci le perçoit comme des bonnes nouvelles et à complètement oublié de s’inquiéter : il va alors se dire « oh noon pas me faire coincer…ah non, attends, c’est vrai, ça c’est l’exercice numéro35 où l’humain me serre puis ensuite j’ai du steak, wouhhouuu ! ».
Cette méthode est basé sur les connaissances modernes en comportement animal et permettent de réhabiliter des chiens auparavant dangereux. On s’en sert pour créer des chiens très stables et sécuritaires qui se sentent à l’aise avec les comportements d’humains et tolèrent énormément de choses peu naturelles au départ. Ils peuvent apprendre d’avoir confiance que si quelque chose les dépasse on va les écouter et ajuster le tout et leur apprendre comment réagir. Cette méthode fonctionne également sur des phobies chez les humains ou pour apprendre à des animaux de zoos de collaborer à des soins vétérinaires invasifs et même douloureux.

Lorsqu’un chien a grogné ou « snappé », il est toujours recommandé de se faire coacher par un professionnel compétant qui travaille avec ces méthodes afin de s’assurer que tout sera bien fait et sécuritaire. Évitez comme la peste les méthodes qui forcent le chien à subir ce qui lui fait peur ou lui imposent de force des situations, punissent les expressions de ses émotions. Beaucoup de morsures sont crées par des méthodes qui punissent le chien pour avoir communiqué qu’il n’est pas à l’aise. On peut apprendre à un chien qu’il n’a pas le droit de grogner, snapper ou montrer les dents…..ce chien est comme une bombe à retardement et, en plus d’une relation de confiance démolie et beaucoup de souffrance physique et émotive pour l’animal, ce chien risque de mordre pour vrai «  sans avertissement »;  il aura bien comprit qu’il n’a plus le droit d’avertir. Par contre, il ne peut pas juste arrêter d’avoir mal ou peur donc il se retient de le démontrer (car on a puni ces expressions) et lorsqu’il est trop stressé, soudainement explose et mord. Un chien sécuritaire est un chien qui sait qu’il a le droit de grogner et en plus, que ses humains vont tout de suite le sauver de ce qui lui fait peur s’il le fait.

Mon chien (que j’ai adopté à l’âge adulte avec un passé violent) a apprit avec ces exercices de tolérer mes câlins et d’espérer un bonbon après. Étant donné que ces câlins ne le stressaient plus, je n’étais plus obligée de lui donner du foie après chaque câlin : sa perception de la situation était modifiée. Après quelques mois, j’ai surpris mon chien de sembler rechercher parfois des câlins et tolérer de plus en plus de manipulations invasives. wow. Mon canidé aime aujourd’hui les câlins ! Je peux lui exprimer mon affection d’une manière humaine et il le perçoit comme de l’affection et non une attaque. Malgré que ce soit complètement contre sa nature canine. Quel bonheur d’enfin se comprendre !

1) Mon chien détendu et heureux dans un câlin qu’il a apprit à tolérer, puis à apprécier à l’aide du contre-conditionnement.

2) Petit chien entrain de « subir »: forcé à rester sur les genoux, il ne s’y sent pas bien: il a des gros yeux inquiets, la bouche fermée, est tendu et se détourne de la personne ne recherchant pas contact. Il y a des chances qu’il cherche à s’en aller si possible. Si la personne qui l’a sur les genoux en rajouteraient encore en le câlinant, le chien pourrait augmenter son
langage et grogner, montrer les dents, se débattre…ou bien continuer à subir; par contre tenter de se sauver la prochaine fois qu’il va croire qu’on veut le remettre dans ce contexte.

3) A: Ce chien est sur la défénsive et peut mordre si on approche un peu plus. Il a la bouche fermée, les lévres prêtes à mordre vers l’avant, des gros yeux qui ne clignent plus, de la tension dans tout son corps.

B: Ce même chien quelques heures plus tard, se laissant caresser avec confiance: Il a les oreilles et le visage détendu, ses yeux clignent et ne sont plus alertes, il recherche le contact.

 4) Un chien mal à l’aise de se faire tenir dans un câlin. Il détourne
la tête, garde sa bouche fermée, a de la tension dans le visage, cherche à éviter ce qu’il perçoit comme enavhissement et potentiel de conflit. Nos chiens tolérent énormément d’une manière très pacyfique. Son humain a réalisé l’inconfort de son chien grâce à cette photo et a travaillé positivement par la suite afin que son chien se sente mieux avec des telles manipulations.

5) Un bel exemple d’un chien élevé dans la sécurité sans conflits avec les humains. Ce chien fût souvent récompensé pour tolérer des manipulations plus invasives et non naturelles. Il en résulte un chien qui ne s’inquiète pas même lorsque ses humains font vraiment des drôles de choses! Loin d’être un chien « cassé » ou dominé, il a plutôt été respecté, compris et aimé. Sa propriétaire a tout de mêmre demandé à son visiteur de déposer son chien à terre et partager son repas de bbq!
———————————————————————————————

Ressources pour mieux comprendre le langage canin :
Langage canin 101
Langage canin excellent lien (en Anglais)
Pour les enfants mais s’applique également aux adultes ! :
http://drsophiayin.com/blog/entry/kids-and-dogs-how-kids-should-and-should-not-interact-with-dogs

http://www.doggonesafe.com/dog_bite_prevention

Article sur la prévention d’accidents avec les enfants, beaucoup de ces concepts s’appliquent pour les adultes :
Leila a peur de Bébé

Article sur l’agressivité dans les situations où le chien protège sa nourriture, os, jouets ou d’autres trésors, le même principe: le chien est simplement inquiet de perdre ce qu’il convoite et nous, on veut qu’il accepte sans problèmes ces situations. On doit comprendre son inquiétude et utiliser des exercices sans conflits pour lui apprendre à ne pas s’inquiéter dans ces situations : Grrrr mon os!

CoeurCanin offre :
– des séminaires sur le sujet de « Langage canin+ Manipulations : de l’agressivité à la Collaboration » à Montréal et à Québec deux fois par année ou sur demande : Séminaires et Ateliers
– des consultations privés chez-vous à Montréal et ailleurs dans la province pour vous aider à travailler ces problèmes et d’autres au besoin: Consultations.

Bonnes conversations avec vos compagnons canins !

Zuzanna(Zuzia) Kubica CDBC
Intervenante en comportement canin à CoeurCanin.com
Propriétaire de la Formation CoeurCanin pour intervenants en comportement animal
Certified Dog Behaviour Consultant of IAABC
cofondatrice du Regroupement Québécois des Intervenants en Éducation Canine

[:]
Share